Réponses post-séisme : comment obtenir un meilleur impact ? 1. Le constat

Réponses post-séisme : comment obtenir un meilleur impact ?

1. Le constat

2010 nous rappelle qu’il y avait des fonds, mais pas de vision, un management approximatif et pas de volonté réelle de changer la situation du pays et de la population. Chaque acteur a fait à sa guise et a gaspillé les fonds, dont une grosse part a été tout bonnement retournée d’où ils venaient. Beaucoup de projets sont restés inachevés ou largement en-deçà de leur facture. L’état s’est fait complice, alors que les besoins et la demande étaient là. Le peu qui a été fait frise tout simplement le misérabilisme et une culture de la dépendance maintenant le pays et la population dans la précarité et la vulnérabilité. Aujourd’hui, c’est la péninsule du sud qui est impactée par le séisme. Après une vingtaine de jours, rien ne semble encore indiquer qu’il en sera autrement. Le temps de l’émotion passé, comment alors échapper à cette logique implacable et faire œuvre qui vaille ?

L’alternative : organiser l’action sur le territoire et travailler avec les compétences locales

Faisons nôtre cette phrase de Richard Bontjer, écrite dans un autre contexte : “My hope is to see international action match the critical need”. Bien identifier les besoins et agir en profondeur là-dessus doivent être l’esprit dominant ou le mot d’ordre. Pour cela, deux préalables deviennent importants et indispensables : a) un plan ou cadre global d’intervention comme point d’ancrage ; b) un ou des modèles de coopération sur les territoires pour un meilleur impact. Il faut en même temps sortir du jargon mystificateur et stigmatisant de « manque de capacité d’absorption », fort souvent implicite à une politique bien calculée, pour insister sur celle de la coopération. Le partenariat public privé communautaire (PPPC), bien conçu au niveau montage (définition claire et nette des rôles et responsabilités, accompagnée d’un dispositif de coordination, de communication et de suivi responsable) permettra d’aller vite et bien. Les maires et les CASEC sont des acteurs incontournables en matière d’orientation, d’approbation et de régulation, alors que les institutions qui interviennent sur leur territoire (en milieu urbain ou rural) ont pour obligation non seulement de travailler à l’intérieur du plan global mais aussi de développer une synergie efficace en matière de complémentarité, permettant aux communautés d’en bénéficier au maximum.

Vu que les maisons sont l’un des éléments les plus affectés par les chocs naturels, avec les toutes autres conséquences qu’on connait, il est important de prendre des mesures. Haïti a des modèles de construction résidentielle en milieu rural de type parasismique et anticyclonique, qui existent par exemple à Pestel, à La Montagne de Jacmel et à Vallue. Ces modèles non seulement ne coutent pas excessivement chers, mais aussi sont assez spacieux, respectent la dignité des gens et l’architecture locale, tout en valorisant l’expertise locale (individuelle et institutionnelle) et en créant des emplois décents qui contribuent à la recapitalisation. Mais plus que des modèles, il faut aussi des mesures complémentaires notamment en matière de zoning, d’information sur l’histoire et la réalité géologique des espaces, et de promotion de l’agglomération contrôlée tant pour éviter la promiscuité et la bidonvilisation, que pour faciliter la fourniture de services collectifs d’amélioration de la qualité de vie. 2010 a permis d’avoir des documents sur les normes de construction parasismique. Maintenant, il faut que l’état prenne les mesures qui s’imposent pour les faire appliquer et respecter.

Rêvons à un Grand Sud régional

Il faut aussi rêver à un « Grand Sud régional à la fois désenclavé, prospère, autonome et résilient », qui doit être la boussole de tout plan de relèvement et de reconstruction. Ce qui nous force à sortir des sentiers battus de la coopération pour imprégner aux actions une nouvelle dynamique d’investissement.

Abner Septembre

Sociologue, Développeur, Chercheur en Sociogronomie au Centre Banyen

Environnementaliste, Ex-Ministre de l’Environnement

@ Vallue, 3 septembre 2021

@louisactualite ( LA )